Affaire Carlos Ghosn
Carlos Ghosn, puissant PDG de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubushi Motors, a été arrêté le 19 novembre 2018, soupçconné d'avoir omis de déclarer une grande partie de ses revenus. Il a été libéré sous caution début mars 2019 puis a été arrêté une nouvelle fois le 4 avril 2019 à son domicile au Japon.
Que lui reproche la justice japonaise?
Le dirigeant de 65 ans est sous le coup d'une triple mise en examen. Sa première inculpation, datant du 10 décembre 2018, l'accuse d'avoir omis de déclarer une grande partie de ses revenus (38 millions d'euros) aux autorités boursières entre 2010 et 2015. Ce serait l'entrée en vigueur d'une loi imposant aux administrateurs les mieux payés de divulger leur rémunération qui l'aurait poussé à agir de la sorte. Il affirme avoir voulu éviter les critiques des actionnaires et des employés, dans un pays où les PDG perçoivent des rétributions plus modestes qu'ailleurs.
Le 11 janvier 2019, Carlos Ghosn est mis en examen pour avoir minimiser ses revenus sur la période de 2015 à 2018, mais également pour abus de confiance. Des placements risqués lui auraient fait perdre 14.5 millions d'euros lors de la crise financière de 2008, une ardoise qu'il est soupçonné d'avoir voulu faire payer par Nissan. De plus, il est accusé d'avoir obtenu qu'un milliardaire saoudien se porte garant de cette dette contre des virements ultérieurs provenant de "la réserve du PDG" en guise de remerciements.
Le 4 avril 2019, il soupçonné d'avoir utilisé la réserve du PDG de Nissan pour des transferts d'argent de plus de 30 millions de dollars vers un distributeur de véhicules Nissan à Oman. Une partie de ces montants lui seraient donc indirectement revenue. Il aurait utilisé ces fonds pour acheter un yacht et investir dans une société dirigée par son fils aux Etats-Unis. Cependant, il n'est pas mis en examen pour ces faits.
Pourquoi une si longue détention?
Le système judiciaire japonais est complexe et sévère. Au Japon, un suspect peut rester en garde à vue jusqu'à 22 jours. A la fin de cette garde à vue, le suspect est soit relâché sans poursuite, soit arrêté de nouveau pour un autre motif. Il peut ensuite être emprisonné dans l'attente du procès, sur une période de deux mois extensibles. 99% des personnes renvoyés devant le tribunal sont jugées coupables sur tout une sur une partie des chefs d'accusations.
Arrêté le 19 novembre 2018, Carlos Ghosn a été détenu plus de 100 jours avant d'être libéré le 6 mars 2019 sous caution. Il a, de nouveau, été placé en garde à vue en raison de nouveaux soupçons. Il a connu plusieurs mandats d'arrêt durant sa détention. Son avocat, Maître Junichiro Hironaka, a dénoncé "une justice de l'otage" tentant de pousser à bout l'ancien patron de Renault-Nissan pour le faire avouer.
Qu'encourt-il?
S'il est reconnu coupable, Carlos Ghosn encourt une peine de 80 000 euros (10 millions de yens) d'amende et de 10 ans de prison pour ses omissions de déclarations de revenus. Concernant l'abus de confiance, la peine maximale est de 15 ans de prison, avec un risque de prison ferme plus élevée.
Que fait la justice française?
Carlos Ghosn n'est pas mis en examen en France. Cependant, il est tout de même visé par une enquête du parquet de Nanterre suite à un signalement de Renault début février 2019. Il est soupçonné d'avoir obtenu la location du Château de Versailles et du Grand Trianon pour l'organisation de son mariage (une prestation évaluée à 50 000 euros) en contrepartie d'une convention de mécénat signée entre l'établissement public et Renault.
Exerce-t-il encore ses fonctions?
Il a été révoqué dès le 22 novembre 2018 (3 jours après sa première arrestation) de la présidence du conseil d'administration de Nissan. Le 26 novembre 2018, c'est au tour du conseil d'administration de Mitsubishi Motors de le limoger. Enfin, il a démissioné de la présidence de Renault le 23 janvier 2019. Il n'exerce donc à ce jour plus aucune fonction dans l'alliance Renault-Nissan-Mitsubichi Motors.
Une fuite au Liban
Empruntant plusieurs avions, Carlos Ghosn est parvenu à s'enfuir du Japon le 29 décembre 2019 pour se réfugier au Liban. Le franco-libanais dit s'être échappé du Japon, où il était assigné à résidence, pour ne plus être "otage d'un système judiciaire japonais partial où prévaut la présomption de culpabilité".
Le principal avocat de l'ancien PDG, Maître Junichiro Hironaka, affirme ne pas avoir ét contacté par son client et avoir appris "par la télévision" que celui-ci s'était enfuie.
Début janvier 2020, la Turquie a ouvert une enquête pour tenter de déterminer comment Ghosn a réussi à s'enfuir au Liban en passant par Istanbul. Cette enquête a permis d'arrêter 7 hommes, dont 4 pilotes. Le 2 janvier 2020, Interpol a émis une demande d'arrestation visant Carlos Ghosn.
Le 8 janvier, le franco-libanais a prit la parole en tout début d'après-midi à Beyrouth. Il a assuré vouloir "laver son honneur" et a notamment indiqué que les accusations de malversations financières étaient "sans fondements".
Le 9 janvier 2020, la justice libanaise a interdit à Carlos Ghosn de quitter le territoire.
Le 14 janvier 2020, Ghosn a traîné son ex-entreprise en justice, exigeant une "retraite-chapeau" qu'il estime à 800 000 euros par an. Une retraite-chapeau est une retraite intégralement financée par l'entreprise qui est, actuellement en France, exonérée de cotisations sociales et de la contribution sociale généralisée. Jugeant que son ex-PDG avait quitté ses fonctions en se retrouvant en prison, le constructeur avait annoncé en Janvier 2019 qu'il avait perdu tout droit à cette pension.
Article réalisé grâce à l'article du journal L'Express intitulé "Carlos Ghosn: décryptage d'une affaire tentaculaire" et aux articles du site euronews traitant de ce sujet.
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